Régions ultrapériphériques : la justice environnementale, angle mort de la Commission

La Commission européenne a publié, en mai 2022, une stratégie renouvelée pour les régions de l'UE les plus éloignées, appelées « régions ultrapériphériques » (RUP), au premier rang desquelles se trouve l’Outre-Mer français. Même si certains objectifs avancés sont remarquables, la justice environnementale apparaît comme le regrettable angle mort de cette stratégie. Nous avons discuté aujourd’hui de ce dossier en Commission des Budgets, où je suis référent pour le groupe des Verts.

Les Régions ultrapériphériques européennes sont au nombre de 9, dont 6 sont rattachées à la France (Guadeloupe, Martinique, Mayotte, Guyane française, Réunion, Saint-Martin), ainsi que les Açores (Portugal), Madère (Portugal), et les îles Canaries (Espagne). (source : Outre-Mer La 1ère)

Le Traité de Fonctionnement de l'Union européenne reconnaît neuf régions ultrapériphériques européennes : la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, Saint-Martin, La Réunion et Mayotte pour la France, mais aussi les Canaries pour l'Espagne, les Açores et Madère pour le Portugal. La Commission européenne propose régulièrement pour ces régions des « stratégies » spécifiques : ce n’est pas une proposition législative formelle, mais plutôt un cadre qui implique d’adapter les différentes propositions à venir en tenant en compte des spécificités des RUP.

Au Parlement, plusieurs commissions ont pour tâche de détailler leur évaluation de cette stratégie :

  • la commission des Budgets, où je suis le référent pour le groupe des Verts/ALE ;

  • la commission du Développement régional (dite REGI), en charge du dossier (où l’eurodéputée EELV Caroline Roose suit le texte pour les Verts)

Des objectifs louables

Les objectifs principaux de cette stratégie sont louables. Il faut, par exemple, se réjouir de la volonté de la Commission de renforcer la coopération des RUP avec les pays et territoires qui leur sont limitrophes, ou plus proches géographiquement que les États membres que sont la France, l’Espagne et le Portugal. Ceci, afin d’assurer une plus grande indépendance notamment économique de ces régions. La Commission prévoit également de créer un outil (« portail » en ligne) qui répertorie les aides financières à destination des RUP, afin de faciliter l’accès à l’information.

Dans la commission des Budgets, le rapporteur, Portugais du groupe de droite, a formulé quelques ajouts bienvenus. Il demande par exemple à ce que les politiques de cohésion participent à atteindre l’autosuffisance énergétique des RUP via les renouvelables. Il rappelle également l’importance que les spécificités de ces territoires soient prises en compte dans tous les programmes et instruments européens.

Un regrettable angle mort : la justice environnementale

Il y a toutefois un angle mort important : le sujet de la justice environnementale n’est pas du tout abordé.

Pourtant, la crise climatique et environnementale touche pourtant particulièrement les territoires ultrapériphériques. Pour la quasi-totalité des territoires insulaires, ils sont soumis aux pressions démographiques sur les littoraux, à la hausse du niveau de la mer, et à la dégradation de l’état de l’océan.

Par ailleurs, de nombreuses RUP ont été victimes d’injustices environnementales et leurs préoccupations n’ont pas été assez souvent entendues. On pense évidemment au scandale du chlordécone : après avoir été interdit d’utilisation dans l’Hexagone en 1990, ce pesticide a fait l’objet de dérogations pour être utilisé dans les bananeraies martiniquaises et guadeloupéennes jusqu’en 1993. Le chlordécone a profondément pollué les sols, les cours d’eau et la faune des Antilles, contaminant par conséquent les populations. C’est une catastrophe environnementale et un scandale sanitaire.

Il faut donc des réponses spécifiques pour permettre aux régions ultrapériphériques de lutter contre ces effets accélérés sur leurs territoires. Nous demandons en particulier des financements pour :

  • la dépollution des sols et des cours d’eaux ;

  • le déploiement massif de sources d’énergies renouvelables locales ;

  • des pratiques agricoles durables.

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