đș Affaiblissement du statut de protection du loup : retour sur un scandale
Le 8 mai 2025, les dĂ©putĂ©.es europĂ©en.es macronistes, de droite, dâextrĂȘme-droite et une partie des socialistes ont votĂ© pour modifier le statut de protection du loup de la Directive Habitats, qui est passĂ© de âstrictement protĂ©gĂ©â Ă âprotĂ©gĂ©â, en sâalignant sur la Convention de Berne. Câest une trahison des engagements de lâUnion europĂ©enne pour la biodiversitĂ© au profit de lobbies agricoles.
La population de loups a naturellement augmentĂ© dans les annĂ©es 1990 dans une grande partie des Alpes, bien quâaujourdâhui elle stagne, lâexpansion territoriale du loup continue dans dâautres rĂ©gions de France. Toutefois, lâOffice français de la biodiversitĂ© (OFB) a dĂ©clarĂ© que le taux de croissance des loups en France est passĂ© de 20 % Ă 9 % entre lâhiver 2018/2019 et lâhiver 2019/2020, ce ralentissement laisse craindre un dĂ©clin de leur population.
Or, cette rĂ©vision acte tout bonnement lâĂ©limination des loups, sous la forme de tirs de rĂ©gulation en France alors mĂȘme que de nombreuses Ă©tudes montrent que ces tirs ont des effets imprĂ©visibles voire contre-productifs. Des recherches ont montrĂ© que l'abattage des loups dans une meute la dĂ©sorganise et incite les loups Ă se tourner vers le bĂ©tail. Et dâaprĂšs le rapport de lâOFB, une meute sur deux est victime de tirs dĂ©rogatoires lĂ©taux et/ou sont victimes dâactes de braconnage.
Les arguments avancĂ©s par les partisans du dĂ©classement sont faux et vont Ă lâencontre des Ă©tudes scientifiques. Une telle mesure entraĂźne une augmentation du risque de trouble comportemental en tant quâespĂšce territoriale, une diversitĂ© biologique rĂ©duite, et un risque accru dâabattage illĂ©gal. Or, en France, la derniĂšre attaque dâun loup sur un ĂȘtre humain remonte Ă 1918 et celui-ci Ă©tait atteint de la rage. En outre, en 2021 seulement 0,16 % des moutons ont Ă©tĂ© tuĂ©s par des loups en France tandis que 16 % sont morts de maladies, chutes, etc.
Il ne sâagit donc pas dâopposer les Ă©leveurs et Ă©leveuses aux loups mais de promouvoir une coexistence rendue possible par des mesures concrĂštes : une prĂ©sence humaine accrue, des clĂŽtures adaptĂ©es, des dispositifs matĂ©riels de protection et la valorisation de lâaction des chiens de berger. PlutĂŽt que de fragiliser la protection du loup, il faut un accompagnement humain et financier des Ă©leveurs et Ă©leveuses. Car, en rĂ©alitĂ©, les vĂ©ritables difficultĂ©s auxquelles ils et elles font face sont bien plus vastes que la seule question du loup.
Cette Ă©radication est dâautant plus prĂ©occupante que le loup est une espĂšce sauvage emblĂ©matique et essentielle Ă lâĂ©quilibre des Ă©cosystĂšmes. DerriĂšre le mythe du grand mĂ©chant loup se trouve un animal qui contribue Ă la rĂ©gĂ©nĂ©ration des forĂȘts en faisant fuir les herbivores, qui rĂ©gule la faune en limitant le nombre de mĂ©so-prĂ©dateurs et qui Ă©vite la propagation des maladies en Ă©liminant les animaux contaminĂ©s.
Cette rĂ©vision questionne Ă©galement sur le plan dĂ©mocratique ne reflĂ©tant pas lâavis des citoyen.nes. Selon lâenquĂȘte de lâInstitut Savanta (2023), 75 % des ruraux français estiment que les loups ont le droit dâexister dans lâUnion europĂ©enne, tandis que 83 % font de la conservation des espĂšces une prioritĂ©. La sociĂ©tĂ© civile soutient donc la prĂ©servation du loup y compris dans les territoires ruraux.
De plus, cet abattage du loup sâinscrit dans une offensive plus large contre la biodiversitĂ©, tant au Parlement europĂ©en quâau sein des Ătats membres. La droite, alliĂ©e Ă lâextrĂȘme-droite, ne cache pas sa volontĂ© dâaffaiblir la protection dâautres espĂšces telles que les ours, les lynx ou les phoques. Rappelons quâen France, une espĂšce sur trois des mammifĂšres est dĂ©sormais menacĂ©e dâextinction selon le ComitĂ© français de lâUICN. Face Ă ce dĂ©clin de la biodiversitĂ©, affaiblir davantage la protection dâun prĂ©dateur clĂ© est une contradiction Ă©cologique et politique.
Nous, Ăcologistes, nous sommes opposé·es sans hĂ©sitation Ă la dĂ©gradation du statut de protection du loup. Nous avons mĂȘme dĂ©posĂ© un amendement de rejet pour signifier notre opposition absolue Ă cette proposition contre-productive de la Commission europĂ©enne. Bien que celle-ci ait Ă©tĂ© validĂ©e par une majoritĂ© du Parlement, nous continuerons de lutter pour la prĂ©servation du loup et de la biodiversitĂ©, au niveau europĂ©en comme au niveau national.
Résultat des votes du 8 mai 2025 : amendement de rejet de la proposition de la directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 92/43/CEE du Conseil en ce qui concerne le statut de protection du loup (Canis lupus)