Mortalité des loups en France : David Cormand interpelle la ministre de l’Écologie

Madame la Ministre, 

Je me permets d’attirer votre attention sur la situation des populations de loups en France. 

En juillet 2020, l’Office Français de la Biodiversité (OFB) publiait la lettre d’information du réseau loup-lynx. Dans cette dernière, l’OFB nous informait que le taux de croissance des loups en France était passé de 20% à 9% entre l’hiver 2018/2019 et l’hiver 2019/2020.

Dans une note technique de l’OFB de novembre 2020, nous apprenions que la mortalité, toutes causes confondues, des loups pour la période 2014-2019 était passée de 26% à 42%. Dans cette même note, l’OFB rappelait qu’une fois atteint 50% à 55% de mortalité, la population de loups déclinera, jugeant que ces “signaux montrent une dégradation de la dynamique de la population”.

Enfin, l’Alliance des Opposants à la Chasse attire notre attention sur le rapport de reproduction 2020 du groupe PP Alpes composé d’une vingtaine de naturalistes. Ce groupe a étudié dans les Alpes françaises 26 meutes de loups, ce qui correspond à un quart des meutes françaises. Les conclusions du rapport vont dans le même sens que les inquiétudes exprimées par l’OFB. Une meute sur deux est victime de tirs dérogatoires létaux et/ou sont victimes d’actes de braconnage ; 15% de ces 26 meutes ont fait l’objet de tirs légaux particulièrement meurtriers ; enfin, 20% des meutes ne se sont pas reproduites du fait soit des tirs dérogatoires, soit du braconnage.

Toutes les informations que nous recevons, que ce soit celles issues de l’OFB ou de travaux indépendants comme ce rapport, montrent la même chose : la population de loups risque de décliner si la situation actuelle perdure ou s'empire. Nous sommes donc très inquiets de la situation du loup en France. 

Malgré cette situation, vous avez au mois d’octobre dernier reconduit par arrêté ministériel le plafond d'abattage du loup en France. Ce plafond qui avait été augmenté de 10% à 19% en 2019 par expérimentation, puis généralisé en 2020 par vos prédécesseurs, est très problématique pour la durabilité dans le temps long de la population de loups dans l’Hexagone.

Or, les naturalistes du groupe PP Alpes l’ont bien montré dans leur rapport, les tirs légaux et actes de braconnage ont une incidence non seulement sur le loup visé, mais pour toute la meute quand il s’agit d’un mâle ou d’une femelle alpha. 

De plus, et c‘est bien cela qui nous inquiète fortement, la note technique publiée par l’OFB avançant ce taux de mortalité de 42%, fut réalisée avant le doublement du taux d'abattage légal. Nous sommes ainsi très préoccupés des probables effets de cette augmentation importante sur la population de loups dans l'Hexagone.

Enfin, nous aimerions vous rappeler qu’il n’existe à ce jour, aucune étude scientifique sérieuse pour la France, selon l’OFB et l’ONCFS, sur l’impact des tirs létaux sur la déprédation. Dans un article publié fin 2020 sur l’impact des tirs dérogatoires sur la déprédation, publié dans la revue Faune Sauvage (OFB et ONCFS), les auteur-e-s concluent par ces mots : “le nombre d’attaques n’est pas uniquement lié au nombre de loups, mais aussi à une multitude d’autres facteurs. Il ne faut donc pas forcément s’attendre à une relation proportionnelle entre le nombre de loup prélevés et le nombre d’attaques”. La prédation du loup est donc multifactorielle. Toutes les recherches faites à ce sujet le disent. Il apparaît important que les politiques publiques de gestion des populations de loups le soient également et ne se concentrent pas uniquement sur l’aspect simpliste et quantitatif du recours aux tirs létaux. Des études américaines ont notamment montré qu’au contraire, l'abattage de loup dans une meute désorganise totalement cette dernière, créant ainsi une situation où les loups se tournaient davantage vers des proies faciles comme le bétail, à la suite d’un tir létal.

Madame la Ministre, que savez-vous des incidences de cette augmentation des abattages sur la population de loups pour l’année 2020 ? Quelles actions comptez-vous entreprendre pour assurer la protection du loup et éviter une décroissance des populations de loups en France ?

Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de mes sentiments distingués,


David Cormand

député européen

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