Macron - Le Pen :
même combat pour tuer l’accord de Paris
La France a connu sa première canicule de l'été avec des températures dépassant par endroit les 40°.
Pour Marine Le Pen et l’extrême-droite, la solution est simple : il suffit d’allumer des climatiseurs.
Le problème est que si dans certains endroits, comme ceux accueillant des publics vulnérables, la climatisation est nécessaire, celle-ci ne saurait constituer une solution pérenne généralisable. Le monde n’est pas artificiellement climatisable. D’autant que si un climatiseur rafraîchit à l'intérieur des bâtiments, il renvoie de l'air chaud à l'extérieur, aggravant le phénomène caniculaire.
C’est pourquoi la solution la plus efficace et applicable partout est d’agir maintenant et radicalement pour freiner au maximum le réchauffement climatique tout en développant l’isolation des bâtiments et des habitations.
Il s’agit par ailleurs de végétaliser les villes et de développer des stratégies pour faire baisser à tout prix les températures localement en peignant en blanc les toits par exemple.
Pourtant c’est l’exact inverse que fait le Gouvernement en suspendant le 23 juin l'aide « Ma Prime Renov » pour les projets de « Rénovation d'ampleur ».
Il a également divisé par 2,5 le Fond Vert, le dispositif qui aide les collectivités locales à rénover leurs bâtiments en dépit de l'annonce du Président le 5 septembre 2024 de l'objectif de soutenir la rénovation de 40.000 écoles sur 10 ans.
Mais c'est loin d'être le seul renoncement d'Emmanuel Macron et du Gouvernement qu’il a nommé puisque lors du Conseil européen du 26 juin, la France, par sa voix, a remis en question l'objectif européen de 90% d'émissions de CO2 en moins d’ici 2040. C’est pourtant une étape nécessaire pour arriver à la neutralité carbone en 2050.
Or, cet objectif était au cœur de ce qu’avait été la décision historique de la COP 21, couramment appelé « l’Accord de Paris ».
Avec Emmanuel Macron, en matière écologique, les mots ne sont là que pour escamoter les renoncements.
Mais revenons en à Marine Le Pen.
Le RN en particulier, comme l’extrême-droite en général, ont toujours été, au mieux, ambigus sur le dérèglement climatique. Mais désormais, dans le sillage de Trump, il verse dans le climato-scepticisme. Cela les conduit à balayer d'un revers de main les solutions pour lutter efficacement contre le dérèglement climatique et à se ranger aux côtés des intérêts économiques qui bénéficient du statu quo et de la rente des énergies fossiles.
Ce parti-prix est une trahison des classes populaires qu’ils prétendent comprendre et défendre.
Car ce sont les plus pauvres qui règlent la part la plus importante de l’addition de l’inaction écologique. Ainsi, sur la proposition de généraliser les climatiseurs, qui va payer l'électricité ?
Les ménages ?
Sur une période d'un mois d'été chaud cela peut représenter plusieurs centaines d'euros par ménage.
Qui aura les moyens de ne pas crever de chaud en été ?
Par ailleurs, comment Madame Le Pen compte alimenter en électricité les climatiseurs?
Le RN est résolument contre les énergies renouvelables, ils ont d'ailleurs soutenu le projet de Loi Gremillet qui prévoyait ni plus ni moins un moratoire total sur les énergies renouvelables !
Cette Loi vise à une « simplification » normative dans le secteur économique de l’énergie. Qui pourrait être opposé à la « simplification » ? Le problème est qu’en l’espèce, « simplification » signifie d’une part, supprimer les réglementations environnementales et sanitaires qui nous protègent face aux impacts potentiels des installations industrielles et, d’autre part, à accorder un « open bar » à tous les lobbys du fossile et du nucléaire actuellement en place.
Déjà néfaste, cette Loi a encore été aggravée par le vote le 19 juin d'un amendement (heureusement supprimé en Commission Mixte Paritaire - Assemblée/Sénat) d'un Député normand de l'Orne, Jérôme Nury (LR), proposant un moratoire sur le développement de nouvelles installations éoliennes et photovoltaïques !
Alors que le monde entier accélère sur le développement des énergies renouvelables, une majorité à l’assemblée nationale de la France, qui est déjà en retard, a ni plus ni moins proposé d'arrêter leur développement.
Depuis, le Ministre de l’intérieur de Droite, Retailleau, a repris cette idée à son compte en publiant une tribune allant dans le même sens.
Mais pourquoi donc proposer une chose aussi stupide ?
Pour la droite et l'extrême droite, les renouvelables coûtent trop cher et ne fonctionnent pas assez bien alors qu'on aurait la « chance » de disposer d'une électricité « bon marché » grâce au… nucléaire.
Le problème est que cette affirmation repose sur des fables.
Les énergies renouvelables produisent désormais une électricité moins chère que celle issue des nouveaux réacteurs nucléaires. Et tandis que le prix du nucléaire augmente, celui des renouvelables continue de baisser. Les solutions de stockage s’améliorent également…
Par ailleurs, les thuriféraires du nucléaire, pour alourdir la charge des renouvelables, n'hésitent pas à trafiquer les chiffres.
La palme revenant au RN qui dans le coût des renouvelables inclus l'ensemble du renforcement des réseaux d'électricité pour une bonne part imputable au… nucléaire.
Autre vérité alternative qu’ils n’hésitent pas à répéter Ad nauseam: les renouvelables, du fait de leur intermittence, menaceraient la stabilité du réseau. Pour illustrer leur « argument », ils mettent en avant le black-out survenu en Espagne en attribuant la faute aux renouvelables.
Sauf que l'histoire est toute autre.
Les autorités espagnoles ont communiqué leurs conclusions sur l'incident. Deux responsabilités sont engagées, celle du gestionnaire de réseau et celles des trois principaux opérateurs.
Le Gestionnaire du réseau Red Eléctrica de España (REE) a sous-estimé les risques de rupture et pris de mauvaises dispositions pour y remédier.
Un peu de technique. La fréquence du réseau devant être maintenue à 50 hertz, les gestionnaires conservent des centrales en réserve pour pouvoir intervenir et stabiliser le réseau en cas de besoin.
REE avait noté plusieurs jours auparavant des anomalies dans le réseau. La veille du black-oust du 28 avril, REE est avertie que l'une de ses centrales de réserve est en panne et décide de … ne pas la remplacer. Sans doute pour faire des « économies ».
Mais les dysfonctionnements ne s'arrêtent pas là car, non seulement les opérateurs n'ont pas respecté leurs obligations de tenir en réserve leurs centrales, mais de surcroît ils ont mis beaucoup trop de temps à les remettre en service.
La fiasco du 28 avril en Espagne n'incombe pas aux renouvelables mais à une série de causes que l'on peut rattacher à la recherche effrénée de profit :
La crise est déclenchée par l'arrêt massif d'unités de production face à la dégringole du prix de l'électricité, conséquence indirecte de la libération du marché voulue par l'Europe ;
Le gestionnaire du réseau espagnol informé plusieurs jours avant de difficulté techniques a décidé de les ignorer, très certainement face au coût de la mise en réserve d'une centrale ;
Les opérateurs privés d'énergie n'ont pas respecté leurs obligation de mise en réserve de centrale et ont réagit beaucoup trop lentement pour répondre aux demandes de REE.
Malgré les faits, c’est dans cette atmosphère nauséabonde de fake news que nos responsables politiques au pouvoir jouent notre avenir énergétique à la roulette russe.
Entre l’influence des lobbys et la démagogie anti-écologique, la France se perd dans un acharnement thérapeutique pro-nucléaire qui fait également le jeu des entreprises fossiles.
Si le texte dit « Gremillet » a été expurgé de l’amendement imbécile du Député Nury, il prévoit désormais la construction de 14 nouveaux réacteurs nucléaire (à la place de 6 actuellement prévus) alors que l'EPR de Flamanville a de nouveau été mis à l'arrêt le 25 juin après 18 ans de chantier et avoir coûté 22,6 milliards d'euros.
Il prévoit également de revoir à la baisse les objectifs en matière de renouvelable en les englobant avec le nucléaire sous la bannière « d'énergie décarbonnée ». Pour faire pression, le RN menace d'une motion de censure si la future Programmation pluriannuel de l'énergie (PPE) 2024-2035 ne va pas dans le bon sens, comprendre si elle prévoit « trop » de renouvelable et pas assez de nucléaire.
Le décret était censé être publié « avant l'été » mais face aux lobbys nucléaire le Gouvernement tergiverse et l'annonce pour la « fin de l'été ».
Le texte a été examiné en séance le 8 juillet au Sénat et c’est hélas cette fuite en avant qui est entérinée.
Pourtant, les faits sont têtus. Il y a quelques mois, la Cour des comptes demandait au Gouvernement de repousser toute décision sur son parc EPR 2, car sa robustesse financière était insuffisante.
Par ailleurs, nous avons vu que lorsque la température augmente, les réacteurs nucléaires doivent être mis à l’arrêt… Car l’eau n’est plus assez fraîche pour pouvoir les refroidir.
Trop cher, trop lent, trop lourd, non seulement le nucléaire n’est pas une réponse viable face au réchauffement climatique, mais en plus, le réchauffement climatique rend le nucléaire inapte à fonctionner de manière prévisible et permanente, ce qui est pourtant censé être son avantage par rapport aux renouvelables.
Dans cette affaire, Emmanuel Macron se sera conduit dès l’origine comme un apprenti sorcier.
Il a été le ministre de l’industrie qui a forcé la main pour le contrat « suicide » qu’EDF a signé avec la Grande Bretagne pour la construction des réacteurs EPR d’Hinkley Point ; Contrat qui avait entraîné la démission à l’époque du directeur financier d’EDF qui craignait pour la capacité financière d’EDF d’assumer un tel pari… Les mêmes craintes que partage aujourd’hui la Cour des comptes pour la construction des futurs EPR 2 français…
Il a été celui qui a tenté par tous les moyens, y compris l’alliance avec Orban, d’inclure le nucléaire dans la « taxonomie verte » en dealant le fait d’y mettre aussi le gaz pour obtenir une majorité…
Il est aujourd’hui celui qui est prêt à développer à tout prix des méga data center et des puissances de calcul, particulièrement voraces en électricité, en livrant nos données à l’Arabie Saoudite en échange d’investissements, le tout pour donner des débouchés à « notre » nucléaire…
Par son inconséquence, Macron aura été le fossoyeur des accords de Paris.
Et il est le porte-voix de ce renoncement au niveau Européen.
Celui qui avait commencé son premier mandat avec un discours de La Sorbonne orienté vers l’ambition européenne, et avoir prétendu prendre le flambeau du « Make our planet great again » face à Trump, termine son deuxième mandat comme le principal partenaire et soutien des lobbys installés de l’énergie.
C’est un désastre pour notre pays qui risque de s’enfermer dans une stratégie technologique désuète, terriblement coûteuse et qui pourrait nous être fatale.
C’est aussi un désastre pour l’Europe d’avoir un Président français qui agit comme un poids mort alors que notre continent est déjà face a la tentation réactionnaire et obscurantiste de l’extrême-droite.
Décidément, Macron se sera révélé comme l’exact inverse de ce qu’il avait rêvé incarner.
Son « nouveau monde » n’aura jamais été autre chose qu’obsolète. Et cette nostalgie infantile aura beaucoup fait pour rendre crédible et acceptable la nostalgie identitaire et morbide de l’extrême-droite.