Pour Michèle

C’est avec une déchirante tristesse que je vous écris ces mots.

Michèle Rivasi nous a quitté ce matin, à Bruxelles.

Nous autres, écologistes, sommes sous le choc, hagards, anéantis.

Et nous qui la connaissions et travaillions avec elle, nous étions toutes et tous profondément attachés à Michèle. Et plus encore en la côtoyant depuis 2019, pour les nouvelles et nouveaux député•es européen•nes alors nouvellement élu•es. Michèle est partie à Bruxelles, mais elle était de cœur dans la Drôme, dans la maison qu’elle affectionnait, auprès de ses animaux et des siens. Le lien à cette terre et à celles et ceux qui y vivent était omniprésent dans la conception qu’elle se faisait de son mandat européen. Toujours près des gens. Pas trop près de l’establishment qu’elle connaissait pourtant suffisamment pour le bousculer comme nulle autre mais dont elle se méfiait. Michèle n’était pas de ces élu•es que l’institution formate et finit par polir. Elle savait pourquoi elle était là, et surtout, surtout, elle n’oubliait jamais au nom de qui.

On ne peut en vérité qu’être amoureux de Michèle car tout en elle inspire la convivialité, l’accessibilité, l’authenticité, la vie. Même dans ses coups de gueules ou ses positions, sa franchise intransigeante mais bienveillante l’emportait sur tout le reste.

L’âpreté des luttes politiques qu’elle a mené toute sa vie faisait d’elle une combattante absolue pour la justice et la transparence. Michèle était une politique dans ce qu’il y a de plus noble et c’était aussi une scientifique. Elle portait en elle à la fois la passion de la conviction et la force de travail de la rationalité. Elle était en cela viscéralement écologiste. Elle ne baissait la tête devant aucun ennemi, et moins encore lorsqu’il était puissant. C’est d’ailleurs ceux-là qu’elle décidait précisément d’affronter en premier avec le panache tranquille mais inébranlable qui l’habitait.

Michèle parlait à un peuple que peu de politiques savent encore toucher. Car vis à vis de la force de l’arbitraire qu’une institution ou qu’une multinationale impose aux plus fragiles, elle ne se trompait jamais de camp. Elle ressentait avec sincérité et spontanéité exactement les mêmes sentiments d’incompréhension, d’injustice et de révolte que ces derniers : les invisibles, les méprisés, celles et ceux qu’on n’écoute pas.

Rien des misères du monde ne lui était étranger. Michele ne jouait pas un rôle. Elle entendait celles et ceux que trop souvent, nous n’entendons plus. Et la réponse qu’elle apportait alors pour sublimer les colères légitimes était de se battre sans concession pour que la Démocratie l’emporte toujours face aux intérêts des dominants et leurs lobbies.

Alors voilà, nous contemplons le manque immense qui s’étend là, au fur et à mesure que nous réalisons ce qu’il vient d’arriver.

Mon dieu, nous l’aimions. Nous l’aimions tant et nos larmes se mêlent à celles de sa famille et de ses proches auxquels nous pensons avec toute la chaleur et la tendresse possible.

Michèle était des nôtres. Elle le demeure à jamais : inspirante, puissante et forte de l’amour qu’elle portait à tout ce qui vit et respire.

Bruxelles, le 29 novembre 2023,

David Cormand, député européen, co-président de la délégation Europe Écologie

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